Lavage des membranes (Osmose inverse et Nanofiltration)
ÉVALUATION DE LA NÉCESSITÉ DE LAVAGE DES MEMBRANES
Établir la période de lavage des membranes se base d’abord sur les recommandations du manufacturier, ensuite sur un historique de suivi. Il est important de suivre les recommandations du manufacturier pour la garantie des membranes ou de l’ensemble du système de traitement.
Généralement, la décision de laver une membrane se base sur l’un ou l’autre des critères suivants :
• La perméabilité normalisée a diminué de 10 à 15%;
• Le taux normalisé de passage de sels (TDS) a augmenté de 5 à 10 %;
• L’écart de pression entre l’entrée (alimentation) et la sortie des membranes (côté retentât) (c’est ce qu’on appelle la perte de charge au sein du système membranaire) a augmenté de 10%.
La pression ne doit pas être la référence utilisée pour décider du lavage des membranes, car la pression dépend beaucoup de la température (qui elle affecte la viscosité de l’eau) et il est difficile de normaliser (c’est-à-dire de corriger la pression par le facteur température).
Consulter le fichier Excel d’évaluation de la performance des membranes, entrez les données pour décider de la nécessité de laver les membranes.
GÉNÉRALITÉS SUR LE LAVAGE DES MEMBRANES
Pour les systèmes industriels et commerciaux de filtration membranes, la plupart du temps la source d’alimentation est l’eau traitée par les installations municipales ou à la limite l’eau d’un puits artésien de bonne qualité. La source d’eau est donc relativement peu chargée en matière organique. L’encrassement de la membrane est la plupart du temps lié aux bactéries (biofilms) ou aux composés inorganiques (origine minérale).
• Pour l’encrassement par des minéraux métalliques (carbonate de calcium), un lavage acide est généralement recommandé;
• Pour un encrassement biologique, un lavage alcalin (basique) et/ou désinfection est recommandé;
• Pour l’encrassement organique, par la silice, par les colloïdes inorganique (silt, limon) un lavage alcalin est recommandé.
Lorsqu’on doit combiner plusieurs types de lavages parce qu’on soupçonne différents types d’encrassements, le choix de la séquence de lavage doit être faite judicieusement. Si l’eau à traiter contient beaucoup de matière organique, limon, argile, etc. le lavage alcalin doit se faire en premier et des fois il n’est même pas nécessaire de faire un lavage acide après. S’il n’y a presque pas de matière organique dans l’eau traitée (ex : eau déjà traitée par la ville qui est souvent le cas dans les industries), le colmatage est surtout inorganique (entartrage), on va alors préconiser un lavage acide en premier. Une séquence de lavage d’un système industriel ou commercial pourrait se faire dans la séquence suivante :
• Drainage et rinçage pour éliminer les composés solubles et les couches faiblement attachées à la surface de la membrane.
• Lavage à l’acide pour dissoudre les minéraux et éviter la formation éventuelle d’hydroxydes insolubles (lors du lavage basique). Acide chlorhydrique (muriatique), nitrique, phosphorique ou citrique. On vise généralement un pH proche de 2 (situé entre 2 et 3). L’acide chlorhydrique est très efficace sur le carbonate de calcium à pH entre 1 et 2 (voir si la membrane supporte un pH < 2). L’acide citrique est souvent utilisé pour laver les membranes lorsqu’on soupçonne un colmatage au fer (hydroxyde ferrique). Une solution contenant 2% d’acide citrique est généralement utilisée.
• Rinçage.
• Lavage à la base pour hydrolyser la matière organique et biologique. La base est souvent une combinaison d’hydroxyde de sodium avec un agent chélatant (complexant) comme l’EDTA. Il existe différents produits commerciaux pour le lavage alcalin à un pH proche de 12 (entre 11 et 12).
• Rinçage.
• Désinfection qui n’est pas toujours pratiquée en même temps que les lavages à l’acide et à la base. En effet, après un lavage acide à pH 2 et un lavage alcalin à pH 12, la plupart des bactéries devraient être désactivées. La désinfection sera effectuée souvent séparément lorsqu’on soupçonne un colmatage biologique manifeste. Dans ce cas là, il arrive souvent que les bactéries qui ont colonisé la surface membranaire se soit protégées par des composés glucidiques (glycocalyx) qu’il faut détruire avant s’atteindre les cellules bactériennes. Le désinfectant utilisé dépend de la nature des membranes. La plupart des membranes d’osmose inverse ou de nanofiltration sont sensibles au chlore, même à très faible dose. Ce n’est donc pas un désinfectant à utiliser. L’acide péracétique (qui contient un certain pourcentage de peroxyde d’hydrogène), le peroxyde d’hydrogène, le métabisulfite de sodium et certains aldéhydes sont les désinfectants utilisés. Lorsque le peroxyde d’hydrogène est utilisé, il est nécessaire de baisser le pH vers 2 ou 3 pour en assurer l’efficacité. Certaines restrictions sont liées à l’utilisation des désinfectants. C’est par exemple le cas du peroxyde d’hydrogène qui ne doit pas être utilisé à une température au-delà de 25 °C en présence de fer ou de manganèse, car pourrait affecter l’intégrité de la membrane. Il ne doit pas non plus être utilisé à une concentration au-delà de 0.25%
Il est recommandé de faire suivre la désinfection d’un lavage basique. Cela permet de déloger la matière biologique mais aussi la matière organique servant de substrat.
Lorsqu’il s’agit d’un système d’osmose inverse servant à traiter de l’eau de surface par exemple, à moins d’avis contraire, le colmatage sera surtout organique ou inorganique non métallique (limon, argile, etc.). Dans ce cas, le lavage alcalin est celui qu’il faudra effectuer de manière courante et toujours en premier lorsqu’on fait une succession de lavages.
Les systèmes d’osmose inverse traitant directement une eau douce de surface sans un prétraitement préalable enlevant du moins partiellement la matière organique ne sont pas courants. Dans la plupart des cas, l’eau sera traitée d’avance et l’osmose inverse sera utilisée pour un affinage ou pour enlever un ou des contaminants particuliers.
La séquence peut être modifiée en fonction de la nature des produits de lavage utilisés, mais généralement, si on soupçonne tant soit peu un encrassement inorganique (par des minéraux), le lavage acide doit être effectué en premier compte-tenu du fait que si le lavage basique est effectué avant, cela va contribuer à une précipitation de minéraux ou à la formation d’hydroxydes insolubles. Ces composés seront plus difficiles, voir impossible à dissoudre par un lavage acide ultérieur.
De manière générale, le lavage acide a tendance à légèrement resserrer la structure des membranes, donc a fermer un peu les pores, ce qui entraine une légère baisse de débit, alors qu’un lavage alcalin a tendance à ouvrir un peu plus les pores, ce qui peut entrainer une légère hausse de débit. Dans les deux cas, il s’agit d’effets à court terme.
PROCÉDURE DE LAVAGE DES MEMBRANES
Pour certains systèmes CIP, toutes les étapes de lavage sont déjà préprogrammées dans le système de contrôle (l’’automate). Allant du remplissage du réservoir aux différentes séquences de trempage/recirculation. Toutes les vannes sont automatiques et les bonnes valves s’ouvrent pendant que les autres se ferment pendant la période de lavage.
Dans certains cas (système CIP entièrement automatisé), la solution de lavage peut même être ajoutée automatiquement et une pompe de recirculation installée sur le réservoir permet de mélanger la solution de lavage.
Pour les systèmes CIP partiellement automatisés, il s’agira de préparer la solution de lavage une fois que le réservoir CIP est rempli au niveau établi.
Ici, nous décrivons les étapes de lavage avec un système CIP non automatisé.
Avant d’arrêter le système en opération, remplir le réservoir de lavage et aussi les réservoirs annexes si disponibles, puis rincer le système avant l’arrêt. Si le système n’est pas doté d’un rinçage automatique, cela peut se faire manuellement et consiste à opérer le système en mode filtration à grand débit en ouvrant grandement la vanne du concentré de sorte à baisser la pression et réduire le débit de perméat au minimum. Un rinçage de 5 minutes est suffisant.
Pendant le rinçage, préparer la solution de lavage en ajoutant les produits chimiques nécessaires au réservoir de lavage. Il faut mélanger (à l’aide d’un tube en plastique – morceau de riser?) pour s’assurer que tout ce qui doit être dissous l’est et que la solution est homogène. Mesure le pH de la solution.
Un système membranaire est toujours plus efficacement lavé à l’eau chaude. À moins d’indication contraire, une membrane est bien lavée entre 25 et 38°C, Alors s’il y a la possibilité de chauffer l’eau de lavage ou de remplir le réservoir plus tôt pour qu’elle prenne la température ambiante plus chaude, ne pas hésiter à le faire. Dans les deux cas, chauffer l’eau avant d’ajouter le produit de lavage.
Arrêter le système, ouvrir ou fermer les vannes nécessaires. Le lavage se fait en boucle fermée. La source d’alimentation est le réservoir de lavage et aussi bien le concentré que le perméat sont retournés au réservoir de lavage.
Démarrer le système en mode lavage si ce mode existe, sinon ouvrir la valve du concentré au maximum pour baisser le débit de perméat et la pression. S’il y a une vanne de recirculation, l’ouvrir pour partiellement (veiller à ne pas dépasser le débit maximum à l’entrée des membranes). Un lavage se fait toujours à haut débit mais basse pression. Habituellement le lavage d’un système d’osmose inverse ou de nanofiltration se fait entre 30 et 60 psi.
Pour ne pas trop diluer la solution de lavage, se préparer au début du lavage à envoyer le volume équivalent au volume mort du système à l’égout à travers la vanne du concentré. Si tout cela n’est pas possible, se préparer à compenser la concentration de la solution de lavage lorsque le régime constant de circulation d’eau dans le système sera établi. En effet, il sera souvent question de suivre le pH de la solution du lavage dans l’optique de rajouter du produit de lavage s’il y a une baisse importante observée pendant le lavage due à la dilution ou simplement à la suite des réactions chimiques. Ainsi lorsque le régime de lavage sera établi (recirculation pendant 2 à 5 min), mesurer le pH de la solution. S’il y a un écart de plus de 0,5 unité de pH par rapport à celui désiré, rajouter de la solution de lavage pour le rétablir. La vérification du pH ne se fait pas seulement au début. Il devra se faire à différents moment pendant le lavage et être rétabli s’il y a variation de plus de 0,5 unité de pH.
Un lavage se fait généralement selon la séquence suivante : recirculation / trempage / recirculation. Le temps accordé à chacun de ces étapes est très variable selon le type de membrane, la nature du colmatage et le produit de lavage utilisé. Dans certains cas, les membranes peuvent être trempées pendant toute une nuit.
Pour un lavage simple, ordinaire allouer 20 minutes à chacune des étapes.
Si le lavage se fait avec de l’eau chaude et que la température tend vers la limite imposée. Arrêter le système et laisser les membranes trempées dans la solution de lavage. Puis recirculer après, lorsque la température aura baissé ou quelques minutes avant la fin de la période de lavage.
À la fin des séquences, arrêter le système.
Ouvrir et fermer les vannes nécessaires pour le mode rinçage, puis démarrer le système en mode rinçage. Si pas de mode rinçage automatique. Opérer le rinçage comme décrit précédemment. Vérifier s’il est possible pendant un moment d’envoyer la solution de lavage restant dans le système vers le réservoir de lavage (pour éviter d’envoyer l’eau très acide ou très basique directement à l’égout).
Le rinçage se fait généralement à l’eau prétraitée et dure 10 à 15 minutes. En fait il devrait se poursuivre jusqu’à ce que le pH de la solution revienne à la normale. Pendant l’étape de rinçage, le perméat et le concentré sont envoyés à l’égout.
Des fois il peut être est nécessaire de faire successivement différents types de lavage ou de répéter un type donné de lavage. Il est toujours conseillé une étape de rinçage entre deux lavages.
Après le rinçage, démarrer le système en mode production. Après 10 – 15 minutes d’opération, prendre les conditions d’opération du système (débits, pressions, température) et faire les calculs nécessaires pour vérifier si le lavage a été efficace. Vérifier aussi la qualité du perméat (conductivité, TDS, turbidité, etc.).
Noter qu’un lavage acide a tendance à resserrer les pores des membranes et qu’un lavage alcalin a tendance à les ouvrir. Il se pourrait qu’il y ait de petites variations de qualité de perméat après un lavage, mais tout devrait se rétablir après quelques heures d’opération.